En termes de gameplay,
Lies of P applique la formule Souls à la lettre. Les attaques se font via les gâchettes, l'esquive est sur
, les consommables sur
... Bref du classique. De même, les différentes stats dans lesquelles vous pouvez investir votre expérience durement gagnée sont identiques en tous points à ce que l'on retrouve dans ce style de jeu.
Là où le titre va se différencier, c'est au niveau des nombreuses mécaniques de personnalisation des armes et du personnage. Des mécaniques peut-être trop nombreuses d'ailleurs. Ainsi, vous pouvez modifier votre bras de Légion afin d'y incorporer un grappin, un lance-flammes ou un canon. Il y a aussi la possibilité de dissocier les armes que vous trouvez en deux parties : les lames, qui influent sur la puissance de l'arme, et les poignées, qui définissent le pattern de vos coups et le scaling. Une proposition sympatique mais qui s'avère finalement limitée dans son utilisation puisqu'une fois la meilleure poignée trouvée en termes de scaling, on ne changera plus d'équipement. Un constat aggravé par le fait que les armes de boss, bien plus puissantes que les autres, ne peuvent pas être dissociées. Si bien qu'il n'y a finalement pas grand intérêt à exploiter cette fonctionnalité passées les premières heures. Surtout que le jeu défavorise grandement les personnages axé Mobilité (Force dans les autres jeux) et en poussera beaucoup à se tourner vers la Technique pour gagner en rapidité, réduisant encore plus les possibilités. Sauf que là encore, il est impossible de réinitialiser ses niveaux avant d'avoir terminé les 2/3 du jeu.
Mais là où le jeu rate son coup, c'est avec l'organe P. Il s'agit d'un arbre de compétences dont on débloque l'accès au bout de deux heures de jeu environ. En échange de quartz, des éléments cachés dans des coffres ou détenus par la plupart des élites, vous pourrez débloquer divers passifs comme la possibilité d'avoir plus de soins ou de porter plus d'équipements. Le souci, c'est que parmi les différentes compétences à débloquer se trouvent des choses qui devraient être disponibles de base comme la possibilité d'enchaîner les esquives ou de pouvoir faire une roulade pour se relever plus vite au sol. En résulte des situations ubuesques comme lorsqu'un boss vous atomise sans que vous ne puissiez rien faire parce que votre personnage est cloué au sol... Il faudra donc acheter en priorité ces passifs afin d'améliorer l'expérience de jeu aux dépens d'autres compétences. Encore une fois, c'est étrange en termes de game-design et une source de frustration qui aurait pu être évitée très simplement.
Le jeu a d'ailleurs la fâcheuse tendance à vous donner des outils pour survivre au compte-gouttes, vous laissant galérer de nombreuses heures avant d'enfin daigner vous débloquer l'accès à certaines fonctionnalités indispensables comme le fait de pouvoir infuser votre arme avec un élément spécifique...
Si les environnements peuvent s'avérer traîtres, le bestiaire que vous serez amenés à combattre est bien pire. On peut diviser les ennemis en trois types : les boss, les « élites » et le menu fretin. Les ennemis de base ne sont pas très variés – une dizaine tout au plus – et ne posent pas de soucis dans la majeure partie des cas. Une fois que vous aurez intégré le fait qu'il y a un monstre derrière chaque coin de mur et qu'ils adorent les embuscades, vous en débarrasser sera simple. Les élites en revanche sont une autre paire de manches...
Vous croiserez (très) régulièrement la route de ces opposants bien plus gros et puissants que la moyenne. Avec des barres de vie boostées aux hormones et capables de faire fondre la vôtre d'un simple éternuement, ils vous pourriront la vie en se montrant parfois plus puissants que certains boss. Fort heureusement, ils ne réapparaissent pas une fois vaincus. L'idée de proposer encore plus de challenge dans des zones n'en manquant pas à de quoi interroger, surtout que ces adversaires ont tendance à bloquer l'accès au prochain stargazer, vous condamnant à un long chemin pour retourner jusqu'à eux... La chose deviendra même complètement absurde lorsque vous devrez faire face à ce genre de rencontres tous les vingt mètres sans compter les pièges et embuscades les séparant. Encore une fois, on tombe dans l’inutilement dur et c'est avec un long soupir que vous finirez par accueillir chacun d'entre eux. Et n'espérez pas les contourner puisque les portes qu'ils gardent ne s'ouvriront comme par magie qu'à leur mort...
Le clou du spectacle vient toutefois des boss. Plutôt réussis artistiquement, ils souffrent en revanche d'un équilibrage aux fraises. Leurs PV sont beaucoup trop élevés, leurs patterns sont difficilement lisibles et ils ont tendance à vous bloquer dans des enchaînements à rallonge synonymes de mort rapide. Le pire étant qu'à partir d'un certain point, les fenêtres d'action pour porter une attaque se réduisent de plus en plus et tous ont une deuxième phase qui restaure entièrement leur barre de vie et change parfois drastiquement leurs schémas d'attaques.
En ressort des affrontements beaucoup trop longs et punitifs puisque pour s'entraîner sur la seconde partie du combat, il faut à chaque fois lutter pendant de trop longues minutes contre une première forme pouvant vous tuer au moindre faux-pas. Deux solutions se présentent alors : esquiver ou bloquer les coups. La première option est plus que limitée du fait de son bridage et de l'amplitude démesurée de certains assauts. Reste alors la garde. Là encore, deux choix s'offrent à vous. Vous pouvez maintenir
pour bloquer les dégâts mais seul un pourcentage de ceux-ci seront parés. Sur le long terme, c'est donc une solution à éviter puisque votre barre de vie sera grignotée petit à petit et de toute manière votre endurance ne vous permettra pas de bloquer entièrement les combos les plus violents. L'autre option est de presser sur
au moment précis où l'attaque vous arrive dessus. En faisant une parade parfaite, vous ne prendrez aucun dégât sur votre barre de vie et cela contribuera à remplir une jauge invisible qui, une fois pleine, fera passer votre adversaire en état « stupéfiable ». Cela se symbolise par un clignotement de la barre de vie ennemie durant quelques instants. Si vous parvenez à placer une attaque chargée dans ce laps de temps, votre opposant tombera à terre et vous pourrez lui infliger de lourds dommages.
Cette mécanique de parade et contre s'avère plaisante mais manque de peaufinage pour être véritablement satisfaisante. Contrairement à un
Sekiro qui aidait le joueur avec divers signaux visuels et lumineux,
Lies of P fait tout pour complexifier l'apprentissage des coups adverses. Certaines hitboxes sont étranges, le tracking des ennemis est exaspérant et certains enchaînements ont un nombre de coups variables avec des délais plus ou moins fourbes. Bref, c'est difficile, parfois injuste, et on a vite fait de s'agacer devant le flot ininterrompu de techniques qui nous tombent dessus.
En revanche, techniquement, c'est irréprochable. Le jeu est très beau et tourne comme un charme en 60 FPS constant. Je n'ai pas rencontré de bugs gênants et hormis une caméra coincée entre un mur et un monstre trop imposant, je n'ai pas eu de soucis. Côté artistique, ce sera au jugé de chacun. Personnellement, si j'ai apprécié certains panoramas et quelques designs, j'avais beaucoup trop souvent l'impression d'avoir déjà vu ça ailleurs et en mieux.
Bloodborne,
Bioshock,
NieR... autant de références réutilisées de manière assez peu subtile.
Au final le titre manque d'âme ce qui est plutôt cocasse au vu de son sujet. Même constat pour la partie musicale oscillant entre morceaux réussis et sonorités bien trop proches d'autres œuvres...